Alias, pseudo et nom de plume

C'est Julien Hirt qui a récemment soulevé le sujet sur Touittère* : pour ou contre les noms de plume ?

C'est un sujet qui me tient à coeur, vu que je publie sous pseudo. Et honnêtement, la seule raison "contre" qui me vient à l'esprit, c'est que ça peut devenir compliqué pour notre entourage, quand ils doivent jongler entre notre vrai nom, notre nom de plume et d'éventuels pseudonymes en plus.

Un argument contre que j'entends souvent, c'est "je n'ai rien à cacher". Tant mieux pour toi, mais tu te trompes. Tu n'as certainement pas envie de voir diffusées des photos de toi pendant que tu es aux toilettes, par exemple. Ce n'est pas parce qu'un chose n'est pas "honteuse" qu'elle doit être publique.

De la même façon , je ne souhaite pas que n'importe qui puisse trouver mon adresse en cherchant mon nom dans l'annuaire.**

On notera aussi que les noms de plumes sont pratiques quand on publie dans des genres très différents (par exemple : polar d'un côté, jeunesse de l'autre), si on souhaite ne pas mélanger ses publics (voire ne pas les choquer). Un cas classique est la publication dans les "mauvais" genres : si maintenant il n'y a plus guère d'opprobre (à part peut-être dans des milieux familiaux ou professionnels très stricts) à écrire de l'Imaginaire ou du polar, quand ça touche à l'érotisme, ça devient plus délicat 😈

Selon moi, il n'y a pas de honte à avoir à écrire de la littérature érotique... mais il y a toujours des gens pour vouloir vous imposer que si 🙄

Etant donné que 95% des auteurs ont un autre boulot à côté (et parmi les 5% qui vivent de leur plume, au moins 30% est en dessous du seuil de pauvreté 😱), utiliser un nom de plume peut être pratique si on veut garder nos deux carrières distinctes.

Corollaire : si on veut raconter une histoire basée sur des traumatismes subis (ou autres détails très personnels), on n'a pas forcément envie que notre entourage sache d'emblée que c'est nous qui l'avons écrite - ne serait-ce que parce que le regard des gens change quand ils apprennent que vous avez été victime de quelque chose. C'est une chose de savoir que "Jean Dupont, auteur" a été un enfant battu, mais "Jean Durant, comptable" n'a pas forcément envie que ses collègues soient au courant.

Une autre raison, beaucoup plus "soft", de se choisir un nom de plume, c'est lorsqu'on possède un nom trop commun, trop compliqué (très long, avec une orthographe inhabituelle...) ou qui est affligé d'homonymes.

J'ai vu passer récemment une mini-controverse sur une autrice censée être une jeune femme écrivant des romances érotiques, et qui serait en fait un auteur de romans gays. Il ne s'agirait pas d'une usurpation d'identité, mais d'une coïncidence, le nom de la première, assez commun, étant identique au pseudonyme du second. C'est un cas extrême (puisqu'on parle là de deux romanciers), et à mon avis, l'autrice aurait dû se poser la question et faire une recherche avant de choisir sous quel nom publier.

Et à l'opposé, si on a un nom trop unique, qui nous rend trop identifiable sous notre identité réelle. Voire un nom qui sonne mal (exemple tiré de Pratchett : Agnès Créttine).

On trouve aussi (mais de moins en moins), des gens qui prennent un pseudonyme du sexe opposé (souvent sous les conseils de leur éditeur), parce que le genre dans lequel ils écrivent est noyauté par des hommes/par des femmes et qu'on ne veut pas risquer que le public ne s'intéresse pas au livre à cause de ce détail. Version "light" : remplacer un prénom par des initiales ou le raccourcir.

Ensuite, il y a la question d'assumer son pseudonyme. Le meilleur exemple est pour moi le dessinateur Boulet. De mon côté, je n'ai aucune honte à m'appeler Crazy, je porte ce surnom depuis la fac, la plupart de mes amis ne me connaissent que sous ce nom (😈), et ça me convient parfaitement.

Ca peut être problématique si jamais vous vous choisissez d'abord un pseudonyme "ridicule"*** (notamment si vous l'utilisez dans un cadre/à un moment où vous ne publiez pas vos textes dans une optique "sérieuse") et que votre notoriété se monte sur ce pseudo et non votre nom réel ou votre futur nom d'auteur. 

A titre personnel, je ne suis pas fan des gens qui se choisissent un nom d'auteur qui ressemble trop à un nom de personnage, mais c'est juste mon préjugé à moi que j'ai 😳 (et ça ne me dérange pas d'avoir tort dessus). Je peux accepter une autrice américaine nommée Raven Darkshadow (ça peut être son nom réel), ou une française qui s'appellerait Raven Durant, mais une Raven Darkshadow française sonne un peu puéril pour moi (combo "nom étranger + références pseudogothiques + nom ayant une signification évidente") ; chez un personnage, ça serait bien plus justifiable (et donc tolérable à mes yeux).

Bref, il faut pouvoir assumer de se faire appeler par son pseudo en public - et ne pas oublier d'y réagir.

En conclusion, je vais dire que le pseudonymat, en écriture, n'est évidemment pas obligatoire, mais je le recommande, parce que même s'il induit une étape administrative supplémentaire (notamment pour se faire payer à son vrai nom 😁), il apporte de la tranquillité d'esprit et permet de mettre une frontière (modulable à volonté) entre son identité réelle et son image d'auteur.

N'hésitez pas à donner votre avis sur la question en commentaire 🙂

 

PS : j'ai par ailleurs continué à avancer sur Trois Bâtards.




* : bon, en fait, il répondait à quelqu'un que je ne connais pas, mais c'est quand même son touitt à lui qui a attiré mon attention 😛

** : ok, je pourrais me faire mettre sur liste rouge, mais j'ai par ailleurs des raisons de ne pas le faire.

*** : au sens large. Ca peut aller de "groscaca" à un simple "toto86" ou un adorable "mignonlicorneau" : le genre de chose plus facile à porter sur un forum ou dans un jeu online qu'en réunion face à face.


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